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Ces sorciers qui nous endorment ...
Quand les mots ensorcellent
Par Jean-Claude Guillebaud
La politique comme le médiatique, pour l’essentiel, sont faits de mots. Ils sont les briques de la maison commune, les projectiles pour la grande bagarre, les notes pour la mélodie des phrases. En bref, les mots sont la précieuse matière première. Or, ce qui est proprement extravagant, ces temps-ci, c’est l’ingénuité – vraie ou fausse – avec laquelle on nous les sert, tous ces mots. Pas seulement l’ingénuité mais le mimétisme servile, la capillarité sournoise, le copiage sémantique grâce auxquels un certain type de langage finit par s’imposer sur toutes les antennes, à un moment donné. Pensée unique ? Pas si sûr ! Langage unique, langue de bois ? Oh oui, hélas !
Tout se passe comme si l’on avait cessé, depuis belle lurette, d’interroger le langage lui-même ; comme si on ne l’utilisait plus que de manière candide, basique, en oubliant cette évidence : les mots sont rarement neutres. Tout langage transporte avec lui – comme le filigrane d’un billet de banque – un corpus de préjugés, préférences, partis pris, jugements de valeur qu’il faudrait décoder à mesure. Les mots, en d’autres termes, sont chargés d’idéologie. Or, de cet effort minimal, le discours médiatique en général paraît s’être subrepticement dispensé. On use maintenant de la parole un peu "en vrac", sans effort de déchiffrement, sans exigence de sens ou de vérité.
http://www.altermonde-sans-frontiere.com/spip.php?article39368
Tags : mots, langage, –, matiere, l’ingenuite
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