"Les capitalistes aussi, comme l’a souligné le romancier Charles Dickens, préfèrent ne considérer leurs travailleurs que comme des "mains" (des robots déjà !), préférant oublier qu’ils avaient une tête pensante et un estomac.

 Mais, ont déclaré les critiques plus perspicaces du XIXe siècle, si c’est ainsi que les gens vivent leur vie au travail, alors comment peuvent-ils penser différemment quand ils rentrent chez eux le soir ?
Comment pourrait-il être possible qu'ils puissent créer un sentiment de communauté morale ou de solidarité sociale, de modes d’appartenance et de vie collective et significative qui ne soient pas contaminés par la brutalité, l’ignorance et la stupidité qui enveloppent les ouvriers au travail ?
Comment, avant tout, les travailleurs sont-ils censés développer le sens de leur maîtrise de leurs propres destins et fortunes alors qu’ils dépendent si profondément d’une multitude de personnes lointaines, inconnues et à de nombreux égards inconnaissables qui mettent chaque jour le petit déjeuner sur leur table ?"
David Harvey