Par Yves Paccalet

Début août 2016... Quelques lis martagons monumentaux encore en fleurs au-dessus du refuge du Saut, en direction du glacier de Gébroulaz et du col du Soufre, qui unit dans un décor fantastique le fond de la vallée de Méribel (le vallon du Saut) au fond de la vallée de Pralognan (le vallon de Chavière)...

Pauvre glacier de Gébroulaz, qui naît des sommets de Péclet-Polset ! Voici vingt ans, dans sa partie basse, c’était encore un long fleuve tranquille hachuré de crevasses. Il n’en reste qu’une courte langue chahutée, couverte de sable et de roches, non plus blanc-bleu comme dans mon souvenir, mais noire, amputée, malheureuse, agonisante... Le torrent sous-glaciaire qui en jaillit m’a semblé plus proche d’un versement de larmes que d’une sécrétion de plaisir organique... Mais la splendeur du paysage demeure, sous une autre forme, avec des valeurs de volumes et de teintes qui, si elles ont évolué, persistent dans leur intention d’émerveiller la pauvre petite chose humaine responsable du chaos climatique...

Les lis martagons sont, pour la plupart, déjà défleuris dans la montagne. Le petit hanneton poilu trichie fasciée (Trichius fasciatus), qui les visite, se hâte de se gaver de fragments de pétales, d’étamines ou de pistils. Brièveté de la belle saison dans la montagne, où il faut éclore, grandir, se métamorphoser, quêter l’autre sexe et se reproduire en quelques semaines... Chaque être obéit aux rythmes majeurs de la nature - que les humains perturbent désormais de façon sensible. Notamment en réchauffant le climat (en altitude, deux fois plus vite qu’en plaine).
http://www.altermonde-sans-frontiere.com/spip.php?article32035

Je me sens solidaire de l’insecte, surtout s’il s’agit de déguster à pleines mandibules la chair d’une fleur aussi somptueuse !

Altermonde-sans-frontières